Les fonctions sociales du travail

1Le travail social est loin de désigner un champ unifié. Il s’est construit selon des généalogies séparées (le service social, l’éducation spécialisée, l’animation), chaque lignée ayant ses propres axes de clivage et ses traditions historiques (Autès, 1999). Les travailleurs sociaux exercent dans des institutions très diversifiées : centres sociaux, services d’accueil de la petite enfance, établissements pour personnes handicapées, pour personnes âgées, etc. Ils peuvent être des agents de l’État et des collectivités territoriales mais également appartenir au monde associatif. Ce qui rassemble des missions, des pratiques et des acteurs aussi variés est sans doute la relation d’aide ou de service. Toutefois, il n’existe pas, en France, de définition légale ou officiellement reconnue et validée, ce qui peut entretenir un certain flou tant sur les missions assignées au travail social que sur les types de professionnels concernés. On constate plutôt une relative profusion de propositions de définition qui diffèrent selon les institutions qui les proposent. D’ailleurs, le choix du vocabulaire – action sociale, travail social, travail du social, intervention sociale – n’est pas neutre et constitue une position éthique, pour ne pas dire politique.

Questions de terminologie

Du travail social en général...

2Une définition a été donnée par les Nations unies en 1959, laquelle insiste sur le type de relation entre le travailleur social et l’individu : « Le travail social est une activité visant à aider à l’adaptation réciproque des individus et de leur milieu social, cet objectif est atteint par l’utilisation de techniques et de méthodes destinées à permettre aux individus, aux groupes, aux collectivités de faire face à leurs besoins, de résoudre les problèmes que pose leur adaptation à une société en évolution, grâce à une action coopérative, d’améliorer les conditions économiques et sociales. » Quarante années plus tard, la définition proposée par la Fédération internationale des travailleurs sociaux ne se différencie guère de cette première définition. Le travailleur social est présenté comme celui qui « cherche à promouvoir le changement social, la résolution des problèmes liés aux relations humaines, la capacité et la libération des personnes afin d’améliorer le bien-être général. Grâce à l’utilisation des théories du comportement et des systèmes sociaux, le travail social intervient au point de rencontre entre les personnes et leur environnement. Les principes des droits humains et de la justice sociale sont fondamentaux pour le travail social » [1]. Au vu de ces définitions internationales, il n’est précisé ni le type de professionnels concerné ni la clientèle visée.

3En France, le Conseil supérieur français du travail social propose une définition qui repose sur les finalités de ce dernier : « Retisser des liens entre individus et groupes sociaux qui, pour des raisons diverses, se situent en dessous ou en dehors des normes de la collectivité de référence » (cité par Guelamine, 2001, p. 11). On retrouve le même accent mis sur les objectifs dans la définition proposée par le Conseil économique et social : le travail social « a pour vocation première d’aider à ce qu’une personne, une famille ou un groupe de personnes ait accès aux droits que la société lui confère, et crée ou recrée des liens sociaux » (Igas, 2006, p. 18).

4Ainsi, l’ensemble des définitions proposées par ces institutions mettent l’accent sur les objectifs assignés au travail social, sur ses missions dans le cadre des politiques sociales.

…au travail social des Caf en particulier…

5Selon une enquête réalisée auprès des 123 Caf [2], le travail social se définit comme « un outil de développement de l’action sociale familiale des Caf et un levier pour l’institution ». Adossé aux missions liées aux prestations familiales et à la lutte contre la précarité (minima sociaux), le travail social des Caf prend appui, tout à la fois, sur le versement des prestations légales, sur l’aide à la création et au fonctionnement d’équipements et de services en faveur des familles, ainsi que sur le versement d’aides financières (aides aux vacances, prêts et secours).

…en passant par l’intervention sociale

6L’intervention sociale, formulation plus récente, est concomitante aux profondes mutations du champ et à l’arrivée de nouveaux métiers qui n’interviennent plus directement sur la personne mais, par exemple, sur toute une communauté (médiateurs dans les quartiers dits « sensibles », conseillers techniques, chefs de projet, etc.). Elle recouvre ainsi une définition plus large, à savoir l’ensemble des personnes intervenant dans l’institution, dans le champ de l’action sociale, ayant ou non un diplôme de travail social (Igas, 2006). Cette appellation ouvre également une réflexion sur les modèles d’intervention traditionnels du travail social autour de la relation avec un individu, ou sa famille, en difficulté. Il peut s’agir d’intervention basée sur un travail collectif avec des groupes (rencontrant des difficultés communes ou regroupés sur un même territoire) ou encore de développer une intervention sur une communauté de vie existante (Igas, 2006, p. 37).

Des métiers très disparates

7Le travail social est habituellement découpé en quatre grands secteurs d’intervention : l’aide sociale, l’éducation spécialisée, l’animation et l’accueil à domicile. Le diplôme de travail social défini par le ministère en charge des affaires sociales permet de recenser une quinzaine de métiers et qualifications en travail social qui s’étalent sur une large palette de qualifications : auxiliaire de vie sociale, assistante sociale, aide médico-psychologique, moniteur-éducateur, technicien de l’intervention sociale et familiale, éducateur technique spécialisé, éducateur de jeunes enfants, éducateur spécialisé, assistant de service social, conseiller en économie sociale familiale, médiateur familial, fonctions d’encadrement et de responsable d’unité d’intervention sociale, ingénierie sociale, directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale.

8Ce spectre très large de la profession peut être classé en trois grandes familles, selon Élisabeth Maurel (2000) :

  • les métiers de la présence sociale : les métiers d’accueil liés à des équipements sociaux, les métiers de rue (par exemple, la médiation avec les habitants d’un quartier) ;
  • les métiers de l’organisation sociale, c’est-à-dire tous ceux caractérisés par l’absence d’intervention opérationnelle directe ou de relation individuelle d’aide à un public d’usagers ;
  • les métiers d’intervention directe : en lien direct avec l’usager, avec un objectif de transformation de la situation et de résolution des problèmes.
Dans les dernières décennies, le nombre de travailleurs sociaux n’a cessé d’augmenter. Entre 1985 et 2006, le nombre d’étudiants dans les professions sociales a plus que doublé : de 20 000, on est passé à 55 000. Une bonne partie de cette augmentation s’explique par le développement des formations préparant aux métiers d’aide médico-psychologique et d’auxiliaire de vie sociale : 24 % des étudiants se destinent au métier d’éducateur spécialisé, 17 % à celui d’aide médico-psychologique et 15 % à celui d’assistant de service social (Drees – enquêtes auprès des établissements de formation aux professions sociales).

9Selon le ministère en charge des affaires sociales, les travailleurs sociaux sont environ 800 000, employés par les collectivités territoriales, par l’État, par les organismes de protection sociale et par les associations. La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), qui propose de retenir un champ plus limité (excluant les aides à domicile), dénombrait près de 350 000 professionnels en 2002. Quant aux travailleurs sociaux au sein des Caf, l’enquête précitée en dénombre 2 523 au sens canonique du terme, dont 27,8 % d’assistantes sociales, et 1 817 professionnels de l’intervention sociale.

10Par ailleurs, certaines de ces professions sont toujours largement féminisées, avec des taux d’occupation d’emploi par les femmes allant de 63 % dans les métiers de l’éducation spécialisée (qui comprennent les éducateurs spécialisés, les moniteurs-éducateurs, les éducateurs de jeunes enfants, les éducateurs techniques spécialisés) à 95 % dans les métiers de l’aide sociale (assistant de service social), voire 100 % dans le cas des assistantes familiales ou des familles d’accueil.

Notes

  • [1]
  • [2]

    Voir l’article de Cyprien Avenel dans ce même numéro, page 92.

Quelle est la fonction Socialisatrice du travail ?

Ce dernier est chargé d'assurer la protection sociale, c'est-à-dire la protection des individus face aux risques de l'existence (maladies, accidents du travail, chômage notamment). Ce système est basé sur la solidarité entre les salariés qui se protègent mutuellement à travers les cotisations.

Quel est le rôle du travail dans l'intégration sociale ?

L'emploi est un facteur d'intégration sociale car : il donne un statut à l'individu. il assure un revenu et des droits sociaux. avec un emploi, il n'est pas nécessaire d'avoir un réseau de sociabilité.

Comment le travail facilite la socialisation d'un individu ?

Le travail a donc une fonction de socialisation, cad « le processus par lequel un individu apprend et intériorise les manières de penser de sentir et d'agir (normes, valeurs et pratiques) propres à un groupe ou à la société en général » Exemple : le travail inculque certaines normes et valeurs telles que la ...

C'est quoi le pouvoir integrateur du travail ?

Le travail, et surtout l'exercice d'un emploi rémunéré, conservent un pouvoir intégrateur fondamental dans une société où l'emploi procure à la fois des relations sociales, des revenus considérés comme les plus légitimes, et un sentiment d'utilité, de mérite personnel (…).